Accéder au contenu principal

Un projet d'études novateur sur le Codex Borbonicus

Le fait est suffisamment rare pour justifier un billet sur ce carnet. La Bibliothèque de l'Assemblée Nationale a récemment autorisé un projet de recherches sur le Codex Borbonicus. Dans sa volonté de conserver un document polémique en sa possession depuis 1826 et probablement pillé du Palais de l'Escorial lors des guerres napoléoniennes en Espagne, le Palais Bourbon a tranché.


Codex Borbonicus, p.14.
Disponible le 06/01/2014 sur : 

Les analyses auquel sera soumis le document devront déterminer sa période de fabrication. Il existe depuis toujours un débat sur la temporalité de ce document parmi les ethnohistoriens. Certains prétendent qu'il fut élaboré avant l'arrivée des Espagnols en Nouvelle Espagne. D'autres considèrent au contraire qu'il fut peint dans les premières années de la Colonie. Plusieurs questions restent également en suspens : le Codex Borbonicus est-il l'oeuvre d'un tlacuilo (peintre) ou de plusieurs ? De combien de parties est-il composé ?

Long de 14 m, peint sur 36 pages de grand format inhabituel (39 cm x 40 cm), le codex sera donc sorti de sa capsule maintenue à 18° pour être passé au crible d'une équipe dirigée par Bertrand Lavédrine, directeur du laboratoire du Centre de Recherche pour la Conservation, dépendance du Muséum National d'Histoire Naturelle. Le chimiste Fabien Pottier produira d'ailleurs sa thèse sur le sujet. La recherche est financée conjointement par l'Assemblée Nationale et par la Fondation des Sciences du Patrimoine.

En quoi ont consisté les études du Codex Borbonicus ? En mars 2014, en guise de test et de mise en bouche, les chercheurs français ont choisi deux pages, une de chaque côté du document. Ils ont comparé les pigments de couleurs en utilisant la spectrométrie de fluorescence X. Puis en septembre dernier, c'est l'imagerie hyperspectrale qui est mise en oeuvre afin de déterminer la composition chimique du document. Cette technologie, originalement utilisée à des fins militaires et aéronautiques trouve ainsi une application civile inattendue. Les deux côtés du document ont donc été numérisés, représentant pas moins de 400 Go de données ! Reste encore à décrypter toute cette information, notamment au moyen d'un programme en cours d'écriture.


Vidéo sur l'imagerie hyperspectrale.
Disponible le 06/01/2014 

La dernière phase du projet débutera en mars prochain. Elle essaiera d'établir l'origine chimique des jaunes et des marrons qui sont très présents dans le Codex Borbonicus. C'est précisément pour résoudre ce problème que l'équipe de Lavédrine a fait appel à une chercheuse mexicaine : Tatiana Falcon, chercheuse de l'Institut de Recherches Esthétiques de l'Université Nationale Autonome du Mexique connaît bien les colorants que les artistes du XVIe siècle du centre du Mexique utilisaient. Il est plus que judicieux d'intégrer des chercheurs mexicains : on sait combien les Mexicains sont attachés aux documents dont ils ont été spoliés. L'année dernière, les autorités mexicaines n'ont pas hésité à débourser 1 000 000 de dollars pour récupérer le Codex Chimalpahin !

Pour en savoir plus sur le sujet, n'hésitez pas à lire l'article publié sur le site d'El País ou le billet publié par Gustavo Ramírez sur la Red Mexicana de Arqueología.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Arqueologia Mexicana n°99

Avec le titre "De la crónica a la arqueología: visión de cinco ciudades prehispánicas", l'editorial propose une levée bimestrielle un peu moins rutilante que son précédent numéro sur Moctezuma. En même temps, il est difficile de faire plus fort que celui qui reste une figure importante de l'identité mexicaine. Faisons donc un rapide tour du propriétaire. Après les quelques brêves rappelant les fouilles à Chichen Itza, la restauration de la petite pyramide ronde du métro Pino Suarez ou la sortie du catalogue de l'exposition Moctezuma. Azteca Ruler, co-édité par Leonardo Lopez Lujan et Colin Mc Ewan, on peut lire l'hommage rendu par Eduardo Matos Moctezuma au Dr Miguel Leon-Portilla pour les 50 ans de la publication Visión de los Vencidos: relaciones indigenas de la Conquista . Suit une présentation du Codex Ixtlilxóchitl par Manuel Hermann Lejarazu. Le titre de ce document fait référence à son illustre propriétaire, Fernando de Alva Ixtlilxochitl (1578
Au cœur de la zone archéologique de Tulum, dans l'État de Quintana Roo, une équipe de chercheurs de l'Institut national d'anthropologie et d'histoire (INAH) a fait une découverte extraordinaire. Alors qu'ils travaillaient dans le cadre du Programme de Mejoramiento de Zona Arqueológicas (Promeza) sur des sondages préalables à un nouveau sentier pour les visiteurs, une entrée de grotte cachée derrière un rocher a été mise au jour.  Enterrements 6 et 9. Photo : Proyecto de investigación Promeza, Tulum / Jerónimo Aviles Olguin. La découverte de cette grotte, située à l'intérieur de la zone fortifiée de Tulum, a été le point de départ d'une exploration qui a révélé des éléments remarquables. Lors des travaux de dégagement pour aménager un nouveau sentier entre les bâtiments 21 et 25, l'équipe a identifié une entrée scellée par un énorme rocher. En retirant ce dernier, ils ont révélé l'entrée d'une cavité jusqu'alors inconnue. À l'intérieu

Conférence au Musée d'Histoire Mexicaine de Monterrey

Un peu de pub pour notre chapelle. Après-demain, votre serviteur aura l'honneur de participer pour la troisième année consécutive aux Cuartas Jornadas de Estudios Mexicanos, organisées par l'Universidad de Monterrey au Museo de Historia Mexicana, dans le centre-ville de la Sultana del Norte. Au programme cette année, il sera question du "Passé préhispanique aux temps du Porfiriat et de la Révolution". Il s'agit simplement de présenter à un public non-spécialiste comment s'est forgée l'identité nationale mexicaine au moment du pouvoir autocrate de Porfirio Diaz en 1884 et 1910. Au delà de la redécouverte et de la réappropriation du passé préhispanique, on expliquera notamment la systématisation des études archéologiques et anthropologiques à cette époque. Je cherche d'ailleurs une revue pour publier la version de l'article que j'ai rédigé pour l'occasion. Si vous avez des contacts, envoyez-moi un courriel. Au pire des cas, j'utiliserai